Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

LE BONNET ROUGE - 1/3 - RAHAR, conte de Noël pour les grands
LE BONNET ROUGE - 1/3 - RAHAR, conte de Noël pour les grands

À la soixantaine, Klaus Santha n’avait pas pris sa retraite. Sa petite bedaine, sa bouille sympathique et son air jovial trompaient bien son monde. En fait, Klaus était un redoutable pickpocket que sa corpulence acquise au fil des années n’avait pas empêché de faire de l’excellent boulot, d’un point de vue purement objectif. Ses cheveux avaient blanchi, ainsi que sa barbe amoureusement taillée, ce qui lui donnait une apparence respectable rassurante et digne de confiance, pour le malheur de ses victimes.

 

Pourtant, en considérant les débuts de sa vie, rien ne laissait prévoir que notre bonhomme allait prendre le chemin de l’illégalité. Issu de la petite bourgeoisie, Klaus avait eu une enfance loin de toute privation. Il avait même fréquenté de bonnes écoles, tant laïcs que religieuses. Même s’il n’avait pas figuré dans le peloton de tête, il n’était pas dans le troupeau des médiocres, encore moins des cancres.

 

Alors, quand avait-il donc décidé de sortir du chemin de vertu prôné par les bonnes sœurs ? C’était d’autant plus incompréhensible qu’il n’avait jamais eu de mauvaises fréquentations. Bien sûr, il avait bu comme ses amis, et même ivres, lui et ses compagnons de beuverie n’avaient jamais fait d’esclandre ; évidemment, il était tombé sous le charme du tabac, puis avait tâté de l’herbe comme tout soixantehuitard qui se respecte, mais n’avait pas succombé à la drogue finalement.

 

À la vingtaine, Klaus avait décroché un boulot peinard de comptable, et semblait voué à une vie bien réglée et pantouflarde. Était-ce un boulot contraire à son tempérament ? Toujours fut-il qu’il eut une illumination, quand il avait surpris un pickpocket en pleine action dans le bus bondé qui le ramenait à son studio. C’était une jouissance purement intellectuelle de voir la virtuosité du gus qui s’activait sans que ses victimes ne s’en doutassent.

 

Klaus considéra sans complaisance sa vie présente. On disait qu’il avait obtenu une bonne place, garante d’une vie sécurisée… mais qui promettait d’être probablement monotone, sinon morne. Dans plusieurs années, il serait peut-être chef-comptable ; puis, s’il prenait la peine de poursuivre des études, il pourrait devenir expert-comptable. Mais il serait probablement déjà grisonnant à ce stade.

 

Inconsciemment peut-être, il voulait une vie palpitante, se soustraire à une future grisaille abrutissante. Voilà pourquoi, une impulsion soudaine lui fit prendre en filature la petite gouape ; il avait décidé que cet artiste serait son maître, il était convaincu que son gabarit l’aiderait à persuader le pickpocket maigrichon à le prendre comme apprenti, il pourrait utiliser le chantage, et même la force, il était déterminé.

À suivre

RAHAR

Tag(s) : #Les nouvelles de Rahar
Partager cet article
Repost0
Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :