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Il se peut que je ne puisse venir devant l'écran pendant un petit certain temps.

Alors, je propose tout de même de la lecture.

Si les considérations à prétention philosophique auxquelles j'aime me livrer ennuient mes éventuels lecteurs, qu'ils puissent au moins s'amuser en remarquant les illustrations, qui se veulent un clin d'oeil en jeu de mots sur le "Votre Honneur", qui s'emploie aux Etats-Unis quand on s'adresse, je crois, à un Président de Tribunal, mais qui est tout à fait inadapté lorsqu'on est amené à parler à un Président de Tribunal français !

Le Votre honneur, avec un peu d'imagination, se transforme en Veau trôneur et donc, en Veau d'or, symbole de toutes sortes d'idoles ... 

Bises virtuelles et néanmoins sincères. 

 ***

 

  

Veau trôneur -le-veau-d-or-comme-d-crit-dans-le-livre-de-l-exodePondre un essai sur les différences et les utilisations de l’humour et de l’ironie m’intéresse beaucoup mais je sais que c’est là un sujet très ambitieux, sur lequel bien des sommités se sont penchées, parfois en ne cachant pas les difficultés rencontrées à cerner les deux notions et à les distinguer l’une de l’autre. Quand mon père demandait, faussement naïf : « ah, il y a un veau trôneur dans ce film ? »  en passant devant nous, qui regardions la série L’Homme de fer par exemple, où se déroulait une séance de tribunal états-unien, je ne saurai pas décider s’il s’agissait d’humour mordant ou de douce ironie. Je vais donc rester simple et profiter du sujet pour procéder à une petite analyse à mon niveau et tâcher d’y voir plus clair moi-même.

 

 

Veau trôneur - Votre honneur - Robert Dacier, l'homme de ferJe vais aborder les deux concepts uniquement comme deux attitudes qu’on peut avoir dans la vie, entre lesquelles je sais que j’oscille très souvent, avec une préférence marquée pour ce que je pense être de l’humour. Je traiterai ce sujet aussi en pensant aux frictions, aux échanges verbaux violents que j’ai pu lire sur le site, aux incompréhensions diverses, qui comportaient souvent de l’ironie et, je crois, pas assez d’humour, aux sens où j’appréhende les deux attitudes.

 

 

J’ai en effet retenu de mes études et lectures que l’humour ne comporte pas de méchanceté, contrairement à l’ironie. L’ironie vise à dénoncer des injustices, sociales par exemple, à démonter des interlocuteurs jugés trop sûrs d’eux, à souligner les défauts des individus et de la société.

L’humour met en évidence l’absurde de situations, du monde autour de nous et comporte une idée de partage réconfortant avec les interlocuteurs ou les lecteurs. S’il y a partage dans l’ironie, ce ne peut être que dans un Veau trôneur - ricanement, une entente au détriment de quelqu’un. Mais l’ironie est constructrice quand elle a pour but de changer les choses en bien, celle de Voltaire ou celle du Canard Enchaîné pour ne citer que ces deux-là atteignent leur but positif.

 

De là à tirer la conclusion que l’ironie, quand elle n’est pas pure méchanceté, est révolutionnaire et l’humour conservateur, il y a un pas que je ne franchirai pas. En littérature, il est entendu que Jonathan Swift, l’auteur des Voyages de Gulliver, utilise l’humour tandis que Voltaire le Français est passé maître dans le maniement de l’ironie. Les mondes absurdes et cruels décrits par Swift, tout imaginaires qu’ils soient, sont également une dénonciation des dysfonctionnements des états et des sociétés.

 

 

Veau trôneur - 80-erikaDire qu’on fait de l’humour ou de l’ironie de manière spontanée est à coup sûr erroné. Cela s’apprend au fil des années. Etant habituée à être taquinée, mais toujours gentiment par mon père et mon parrain, frère de mon père, j’ai assimilé très tôt cette forme d’esprit complice. D’ailleurs, le dernier souvenir qu’il me reste de mon parrain est un grand éclat de rire : je lui avais rendu visite en l’absence de ma tante sortie faire des courses, il était alité, à un stade très avancé de la maladie de Parkinson et, malgré sa diction difficile à comprendre, nous avions conversé agréablement. Quand je m‘étais levée pour partir, il m’avait recommandé de bien refermer la porte de la chambre à clé derrière moi, me rappelant que ma tante avait toujours peur qu’il ne cherche à se sauver et il s’était mis à rire devant l’absurdité de la situation, moi aussi. Ma tante bien sûr ne craignait pas qu’il se fasse la malle, mais qu’il tombe dans le périlleux escalier en colimaçon… Quelques jours après, mon parrain nous quittait, je ne le revis pas vivant mais le souvenir de sa remarque reste présent et notre rire complice résonne encore dans ma tête.

 

 

 

Veau trôneur - Veau d'or

L’ironie n’étant pas la tasse de thé préférée de la famille, j’ai éprouvé plus de mal à la comprendre et quand j’en étais la victime, je le prenais trop à cœur. Je me souviens d’avoir été très vexée lorsqu’un camarade de voyage un jour avait laissé tombé en me voyant entrer : « ah, voilà Moshé Dayan ! » parce que, portant des verres de contact, je m’étais fait remarquer la veille en égarant l’un d’entre eux, ne voyant plus que d‘un œil avant de retrouver l‘objet précieux. Je n’avais même pas idée de répliquer à l’époque et j’avais pris bêtement ce garçon en grippe, me cantonnant intérieurement dans un rôle de victime. Bien des années après, je ne réagirais pas du tout de la même façon, ne serais pas affectée et lui aurais vite retourné un compliment. J’ai même une idée sur ce que j’aurais pu rétorquer, mais c’est de l’histoire ancienne … tant pis, j’y vais : je l’aurais singé dans son comportement très maniéré, en exagérant les traits, genre petit doigt en l’air et mine souvent dégoûtée : « oh, des poils sur mon pantalon blanc, satané chat qui s’est assis sur ma chaise, vite, quelqu’un a une brosse, je ne peux supporter ça … »). Si cela s’était passé de cette façon, ou l’affrontement se serait terminé, match nul, ou il aurait continué avec une surenchère !

 

 

L’idée m’étant tout de même venue à l’esprit un jour que l’ironie est une arme que je pouvais moi-même utiliser, je m’y suis mise et je crois que j’y ai excellé. Sous le coup de la colère, ou après avoir été vexée, bref me laissant gagner par des sentiments exclusivement négatifs, j’ai souvent décoché des flèches empoisonnées pour me venger et me suis attirée plusieurs fois de solides haines de la part des gens visés, car mes ripostes atteignaient leur but au-delà de mes souhaits. Etonnée et presque horrifiée par les effets produits, j’ai pratiquement arrêté de me servir de l’arme ironie (cependant, il ne faut jamais dire jamais !) et je me suis tournée vers la recette humour à ma sauce, mélange d’attention à autrui, empathie, constatation aussi lucide que possible des différences, refus de la vanité, conscience de mes propres défauts pour aborder l’Autre avec un grand a et ne pas le heurter, même si je ne suis pas d’accord avec lui.

 

Veau trôneur ? Votre Honneur ! witness-for-the-prosecution-1957 w320

 

Comme exemples d’humour, je resterai toujours très simple, en citant également deux exemples : le premier sera un conseil d’un des écrivains du site pour me venir en aide dans ma tentative d’arrêter de fumer : mettre des gants de boxe. A défaut d’être efficace, cela, proposé sur le ton très sérieux qui est propre à l’émetteur du conseil, me fait beaucoup rire et j’en savoure l’humour. Mon deuxième exemple sera la question que j’ai posée un jour à un petit garçon qui revenait de promenade avec son grand-père : « Alors, Papi a été sage ?». Perplexité du petit garçon qui prend son temps pour répondre, se dit certainement : « Lenaïg n’a pas de petits-enfants, elle ne connaît pas les règles » et se sent obligé de m’expliquer, aussi gentiment que possible : « Mais, tu sais, c’est moi qui doit être sage ! ». Je l’ai tout de suite rassuré sur mon état mental (en tout cas, sur ce plan-là) et lui ai indiqué que je savais bien ce qu’il me disait mais que je trouvais drôle d’inverser les rôles, et que ce n’était pas si bête, que lui petit garçon avait également son importance pour veiller sur son grand-père. Moi, c’est le genre de questions qui m’était posée dans ma famille quand j’étais enfant mais l’humour n’est pas inné (l’ironie non plus). Le petit garçon a compris et cela nous fait maintenant une complicité quand je lui repose la question à l’occasion.

 

 

Veau trôneur - Marteau en perruque - canstock5175423

 

 

 

Donc, je trancherai ainsi : garder l’ironie comme arme guerrière non meurtrière pour dénoncer les abus, les erreurs et les injustices du monde (ce que font les chansonniers), sans jamais la diriger sur les individus, poil au … bras (en sachant que, oui, on peut tuer avec les mots, ce qui fait l’objet d’une autre guerre sur le site). Utiliser l’humour à profusion pour sourire, même rire en commun et se moquer des absurdités du monde pour mieux les supporter !

 

 

 

Lenaïg

15 août 2008.

 

 

 

Tag(s) : #Essais
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