DANS LE SEAU
Ce n'est pas de la roche, ni du corail rouge. C'est lisse comme l'intérieur d'une huître... rouge. Et pas d'issue ! Ma compagne, enfin pas dans le sens que l'on croit, est rencognée dans un coin (yo ! y a pas de coin !) et se tient immobile. Moi, je fais le tour, mais aucune chance de s'échapper ; j'essaie de grimper à la paroi, mais je retombe à chaque fois. C'est glissant comme pas possible, je n'ai pas encore vu çà ; c'est plus insaisissable que le rocher gluant d'algues.
Et voilà-t-il pas qu’une pieuvre veut m'attraper. En m'enfuyant, je bouscule la pauvre femelle qui finit par courir aussi. On ne peut que tourner en rond. Curieux poulpe que celui-là : il n'a que cinq tentacules sans ventouses. Et puis, qu'est-ce qu'il peut bien faire en-dehors de la mer ? Je croyais que les pieuvres clamsaient hors de l’eau.
Ah mais ! je ne vais pas me laisser faire. Je vise un tentacule tout près et le pince impitoyablement. Mes aïeux ! je sens une vibration assourdissante, cent milles fois plus forte que celle du ressac. Je m’accroche à ce tentacule qui rougit. Curieux, les tentacules sont prolongés par un gros corps ; c’est peut-être un calmar ou une seiche. Qu’importe, je tiens bon.
Je reçois une tape, mais elle est insuffisante pour que je sacrifie ma pince. J’ai reçu des coups bien plus conséquents
quand une vague me rejette contre un rocher. Mais voici qu’un autre poulpe bien plus grand me saisit. Je brandis mon autre pince et essaie d’attraper un des gros tentacules.
– Mais saperlipopette ! vas-tu lâcher, sale bête ?
– Ouin ! p’pa, ça m’fait mal… maman !
– T’en fais pas mon p’tit gars, j’va le décrocher, c’te merde ! Ouille !
J’ai abandonné le petit tentacule, car j’ai attrapé l’un des gros. Je reçois un coup plus puissant, puis je me sens affreusement balancé. Tant pis, je lâche… je vole… et je me retrouve sur le sable. Sans demander mon reste, je détale à toutes pattes et essaie de repérer mon trou. Sacrebleu ! je ne le retrouve pas. Ça ne fait rien, je m’en creuserai un autre.
J’ai fini d’aménager mon abri et je sors sur le seuil. À ma droite, je vois une jolie femelle à sa porte. Je lui lance un regard égrillard. Ah ! la vie est belle !
Rahar