(Relation dodécasyllabe et ironique d’un fait réel)
Coqueluche des coquettes qui le berçaient la nuit,
Un riche Parisien, épuisé par le bruit
Que prodigue la ville : (le fracas des poubelles
Qui, toujours le matin, lui perçaient les oreilles,
Aboiements de cockers, sifflements des agents,
Tapage de noctambules, clameurs et grincements,
Ou grondements des trains, ou sirènes d’alarme,
Ou voitures et camions créant un grand vacarme…)
Ce citadin souffrant aussi de pollution
(De CO2, d’ozone et de staphylocoques,
De ces déchets urbains qui vous donnent des cloques)
Crut avoir découvert la bonne solution
En acquérant, au centre d’un coquet village,
Une cocasse bicoque d’époque Moyen-Age
Pour y mettre au repos oreilles et poumons,
S’imaginant d’avance, tout comme un coq-en-pâte
En son cocon douillet, dessous sa pergola,
Sirotant son cocktail ou son Coca-Cola,
Tout pendant qu’en cocotte mijotaient aromates,
Coquilles de saint Jacques ou coquelet marengo.
Devant lui, frissonnant, un champ de coquelicots…
Mais il dut déchanter avant que d’y goûter :
S’il pouvait supporter le bruit des tronçonneuses,
Le beuglement des vaches souffrant de fièvre aphteuse,
Le kodaque des cocottes ayant fait leur coco,
Les jappements des chiens regroupant le troupeau,
L’arôme de porcherie, la bouse sur les sentiers,
Le silo qui cocotte autant que le fumier,
Il était courroucé depuis potron-minet
Par les « cocoricos » quotidiens du grand coq
Qui, tôt, s’égosillait, avec l’air qu’on se moque,
Pour réveiller ses poules et son maître-fermier,
Indiquant au soleil le moment du lever
(Sans qui les choses ne sont que ce qu’elles sont) (*)
- "Coquin de sort ! Je ne puis tolérer cet
affront !" Criait le Parisien. Un jour, exaspéré,
L’irascible voisin vint tenter le fermier
D’un air très coquebin : - "Je ne puis sommeiller :
Dès quatre heures du matin me vient un tintamarre
Gueulé par votre coq, et dont j’ai plus que marre.
Une bonne fois pour toutes, mettez en casserole,
Assaisonnée de vin, cette horrible bestiole"
- "Le mettre au coquemar ?
Faire une poule au pot
Garnie de coquillettes de mon fier Renato ?
- Ou autre alternative, si vous y tenez tant :
Vendez-le, vous pourrez vous en faire quelque argent »
- Quoi Monsieur ? Le vendre au coquassier
Comme un vulgaire chapon ? C’est qu’il lui faut cocher.
La gent du poulailler : sans lui, pas de poulettes
Que contre écus sonnants le coquassier achète .
Pour l’insémination il n’a pas son pareil
(Mes poules seraient marries qu’elle fut artificielle :
Elles auraient le remords de le cocufier !)
Par quel tour leurs œufs frais seraient-ils fécondés ?
Sans poussins, point de poules et point d’œufs à la coque,
Ni soufflés concoctés par votre maître-coq…"
COQUECIGRUES ! …
- "Il trouble mon sommeil. De vos beaux arguments
Souffrez que je me tamponne le coquillard.
Rien de bon ne sortant de ce dissentiment,
Je vais, pour vous convaincre, vous coller un coquard (**)
Du bout de mon soulier au mitan du coccyx…"
L’affaire fut envoyée par-devant la justice :
Plainte fut déposée contre coq importun
N’ayant pour sa défense que de faire son boulot.
Faudra-t-il invoquer sainte Brigitte Bardot
Pour que soit respecté le talent de chacun ?
Bientôt apprendrons-nous que le bruit des motos
Serait plus légitime que le chant des oiseaux.
(*) Pardon, Monsieur Edmond Rostand, d’avoir quelque peu écorché votre vers, mais il me fallait retomber sur mes pieds.
(**) Je sais, je sais qu’un COQUARD est un ŒIL au beurre noir. Mais il me fallait une rime à « justice » !
Margoton
Illustrations :
groupe-vocal-equinoxe.com
asterix.com
fotosearch,
et cie ...