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trottoir pas crottoir 1Marcher sur les trottoirs peut relever de l'exploit. Quand ils sont encombrés, ce n'est pas sans danger. A petits pas, à grandes enjambées, en talons fins ou en brodequins, dans la foulée de Di, qui met de l'énergie dans ses pieds plutôt que dans un réservoir, sur les traces de Moca, qui même sous la pluie délaisse le parapluie, les joues rosies ...

 

Ah, moi non plus je n'aime pas les parapluies. D'accord, ils protègent bien quand on n'a pas d'imperméable ni de bonnet, mais on ne sait où les fourrer quand on descend dans le métro ou qu'on grimpe dans un bus, on les oublie au restaurant ou n'importe où mais surtout ... qu'ils sont offensifs, ces parapluies sur les trottoirs ; à vous de vous baisser, de vous tordre le cou pour éviter de vous les prendre en pleine poire ou, pire, de recevoir un coin de baleine dans l'oeil, quitte à descendre carrément sur la rue, à poser un pied sur la piste cyclable au risque de sursauter sous le timbre d'un vélo, furax que vous ayez osé empiéter sur son territoire !

 

Attention aux crottes des amis canins, que leurs maîtres ne ramassent pas tous encore, même s'il faut avouer qu'ils ont fait bien des progrès. Sur les trottoirs encombrés, moult obstacles attendent le piéton. Si on n'est pas distrait, on coutourne facilement les lampadaires ou poteaux divers, mais on n'est pas à l'abri d'une sournoise boursouflure du goudron qui vous fait trébucher, alors que vous atteignez une honorable vitesse de croisière ... Si vous n'êtes pas tombé, vous continuez alors aussi dignement que possible, en claudiquant pendant un temps, si vous avez la chance de ne vous être fait sauter un talon. On se dit, dans ces instants plus ou moins critiques, qu'arpenter les rues de sa ville est plus difficile que gravir un sentier caillouteux, sans trop mentionner les pavés, pittoresques certes mais pas prévus pour des escarpins.

 

Mais ce n'est pas tout, les obstacles sont aussi humains ! Il existe deux catégories d'humains qui marchent sur les trottoirs : les aériens et les "relous". La deuxième espèce s'avère malheureusement la plus répandue. Les relous sont des petits bulldozers qui avancent coûte que coûte, faisant s'écarter les imprudents qui croisent leurs chemins, contraignant tout le monde à se déporter, qui vous arrachent à moitié votre sac à main au passage, alors que vous l'aviez bien en bandoulière, qui vous meurtrissent une épaule ou un bras et sont déjà loin sans s'en rendre compte.

 

Les groupes sur les trottoirs sont encore plus redoutables. Comme rien d'autre n'existe autour d'eux que THE groupe dont ils font partie, ils vous barreront le passage si vous voulez doubler, vous feront descendre sur la rue (même scénario que précédemment). Quelquefois, un électron du groupe fait prendre conscience aux autres qu'ils gênent et là, c'est bien ! Il arrive qu'on marche soi-même en compagnie et, si aucun membre de la compagnie ne présente de difficultés à se déplacer, on peut alors s'impatienter, voire fulminer intérieurement, qu'une conversation animée absorbe tellement les participants que la compagnie parfois se met à piétiner ou à s'arrêter net, comme si parler empêchait de marcher ! On se trouve donc à son tour aussi dans un groupe gênant. Il semblerait que la teneur d'une discussion ou d'un récit fasse oublier à certains le but final de l'action en cours : aller d'un point A à un point B ...

 

Autrefois, dans les campagnes, les curés se livraient à leurs promenades de santé en lisant leur bréviaire, preuve que la marche est le prolongement de la pensée.

 

On est aussi confronté à un autre petit scénario marrant. A qui n'est-ce pas arrivé, cela ? On se trouve à droite du trottoir ; face à soi arrive quelqu'un et la collision est inévitable si on ne fait rien. Alors on se dit : barre à bâbord ! et on s'exécute ... Mais l'entité qu'on a pensé éviter a opéré la même manoeuvre symétrique ! Hop, barre à tribord, qu'à cela ne tienne, se dit-on illico presto ... Hé hé, barre à bâbord cette fois-ci, s'est de son côté dit l'entité inconnue. Et il s'en suit un ballet plus ou moins gracieux, un tango impromptu ! Si l'entité n'a pas la tête à rire, on ravale vite le sien, de sourire, et ... on oublie !

 

Mais certains piétons, quelle grâce ! Quelle agilité, quelle maîtrise de l'espace, quel respect de l'espace des autres, quelle attention généreuse envers leurs congénères passants ! Ces individus sont souvent jeunes (mais pas forcément), sportifs ; on sent qu'ilstrottoir pas crottoir 2 n'ont pas de hargne spéciale à décharger sur leur trajet ; ils se faufilent, car bien sûr ils sont souvent minces, très rapidement, sans vous toucher, sans vous heurter ; ils prévoient les changements de cap à la vitesse de l'éclair, ils présentent leurs excuses légères et décontractées, laissant dans leur sillage dynamique des petites notes de bonne humeur contagieuse.

 

Sur les trottoirs le calme règne par moments et je me souviens d'un petit épisode que j'ai vécu sur l'un d'entre eux, peu fréquenté. Un moineau dégustait une part de brioche abandonnée devant moi et semblait hésiter à mon approche, tout en se dépêchant de picorer son mets de choix, prêt à s'envoler. Je fis un respectueux écart sur la rue, il ne bougea pas. L'Ours Castor se moque encore de moi : "Tu as fait ta BA ce jour-là !" Mais il aurait fait la même chose que moi.

 

Lenaïg - 16 février 2009

Tag(s) : #Billet d'humeur
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