Décompte : 4 3 2 1 0 …
Les tours de la Cité des Indes s'effondrent.
La journaliste précise que de nombreux habitants ont été relogés dans des HLM voisines ; elle sait que HLM est féminin, c'est bien.
N'ayant pas vu les images au journal télévisé, je les retrouve sur internet. J'aperçois, bien que changé, à droite, l'immeuble où j'ai vécu.
Aujourd'hui, 8 juin 2010, je vais à Sartrouville me faire couper les cheveux. Oui, j'ai gardé certaines habitudes dans cette ville, c’est ma ville celle ou je suis né, ou j’ai vécu avec mes parents ; je ne manque jamais de passer me recueillir et prier sur leur tombe. D’autres membres de la famille y vivent toujours.
C'est un peu réticent que je décide de faire un tour à la Cité des Indes voir l'événement télévisé, bien que je ne me rende plus souvent en ce lieu, où j'ai habité, de 1978 à 1984, sauf pour aller chez C. en réunion amicale, ou encore chez J. pour la même raison (j’ai une pensée pour Y., son mari qui nous a quittés). En arrivant en voiture, je contourne le tas de gravas qui a été entouré de barrières et je vais m'arrêter face à l'immeuble où j'ai vécu avec mon fils. La Rue Mélies, n° .., par laquelle j'entrais dans le hall de l'immeuble, n'existe plus ; le studio du bas a été agrandi sur l'ancienne entrée. Devant moi, une montagne de gravas.
Le vent souffle et lève la poussière du béton pulvérisé. Je fais le tour de la montagne, en profitant pour prendre des photos. Il y a encore plusieurs tours pointant vers le ciel. Je reconnais peu le lieu où j'ai vécu, car beaucoup de choses ont changé, que je regrette, même si on remarque une volonté sensible d'amélioration : de nouvelles boutiques ont remplacé celles de l'ancienne dalle, des arbres ont été plantés sur l'ancien parking. Je constate que toutes les portes sont codées. Je ne me sens pas bien, oppressé : la Cité a l'air mal entretenue, les immeubles tristes et vieillis.
A plusieurs endroits, je repère des jeunes, des veilleurs, qui montent la garde ; que gardent ils ? Plusieurs ont une capuche rabattue sur la tête ; ils dissimulent leurs visages ; j'hésite à prendre certaines photos, de peur d'être agressé. En regagnant ma voiture, je vois un guetteur à droite ; il suit mes mouvements. Face à moi, un gros oiseau que, sur le coup, je ne reconnais pas ; je le prends en photo pour donner le change au guetteur !
Je remonte dans ma voiture en prenant une dernière photo de mon immeuble ; six ans de ma vie sont restés là.
L'Ours Castor
http://www.youtube.com/watch?v=1OE1TmSvpF4
Accompagnement musical proposé par l'Ours Castor :
violon - Le Poème, de Chausson.
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Note de Lenaïg : l'Ours Castor devait être vraiment troublé ... Son drôle de gros oiseau est une pie. Dans son émotion, il n'a pas bien perçu les couleurs.