J'aimais beaucoup la communauté du Tableau du samedi de Lady qui offrait une galerie de toiles variées toutes les semaines. Mais si notre Lady Marianne n'est plus, après la stupeur et la tristesse, c'est en pensant à elle que j'ai envie de continuer et peut-être l'aurait-elle voulu ? Partager une découverte, mettre des mots sur les impressions ressenties devant un tableau.
Lors des échanges en commentaires, certaines aminautes soulignaient parfois qu'elles ne souhaiteraient pas suspendre telle ou telle toile dans leur salon ! Pour cette toile-ci, il faudrait avoir les moyens car elle a été vendue extrêmement cher. Ne pas aimer un tableau au point de ne pas en vouloir pour soi n'empêche pas d'y trouver de l'intérêt ; pour les toiles que j'ai déjà évoquées, j'ai toujours cherché à souligner les qualités que je leur trouvais, en tant que spectatrice qui ne sait pas peindre elle-même.
Je ne peux m'empêcher de penser à l'un des tableaux d'Olga Sudorova que j'ai présenté ici pour le Tableau du samedi de Lady (pour le revoir : clic !). Foujita, venu dans sa jeunesse à Paris pour se plonger dans le monde artistique où il a fréquenté Chagall et Modigliani, entre autres, maîtrisait parfaitement le dessin. En effet, autant Olga a procédé par taches de couleurs à profusion, autant Foujita, lui, a tout minutieusement dessiné grâce à du noir sur un pinceau très fin, pour ajouter quelques couleurs ensuite. Pour lui le dessin des contours et des lignes simples devait apporter l'impression d'innocence et de pureté enfantine. Tiens ? Cela me rappelle la ligne claire d'Hergé et sa technique de BD, mais ici pas de simplification du visage et les roses sont également très nettes. Le feuillage de printemps des arbres, petites feuilles ne cachant pas encore le ciel, forme un dôme protecteur.
La toile de Foujita, qui avait 71 ans lorsqu'il l'a composée, au premier regard présente comme un air de petit Chaperon rouge dans son bois ! Mais aucune menace en vue, pas de loup à l'horizon. Un mystère plane sur l'isolement volontaire de la petite jeune fille tandis qu'en arrière-plan, l'atmosphère est animée, un manège tourne, des familles vont et viennent, accompagnées de leurs chiens (et il y en a plein !). Cette petite fille songeuse s'est donc mise à l'écart et ... heureusement qu'elle tient son chat dans les bras, sinon celui-ci risquerait fort d'être importuné par la gent canine ! Ce qui est amusant, c'est qu'une ambiguïté demeure : la position du chat semble suggérer que la fillette est assise et le tient appuyé sur ses genoux (comme dans des portraits classiques) et pourtant nul siège parmi les roses, donc elle est debout !
Quoi qu'il en soit, ce chat tigré paraît serein et confiant, content d'être là et il me met en joie ! Eh bien, c'est leur choix, à tous les deux, de rester entre eux et de profiter des roses autour. L'artiste s'entendait très bien avec les chats comme l'atteste cet autoportrait ci-dessous.
Voilà, tendre toile, originale et subtile, que je dédie à notre Lady.
Lenaïg