Sous le commandement de l'amirnaute Dômi et selon les instructions du capitaine de quinzaine Jeanne :
"A vous de vous laisser inspirer par cette image,
en prose ou en vers, avec ou sans dialogue"
Comment sont-ils arrivés en plein au milieu des champs, ces deux chaises et ce petit guéridon ? Cela fait partie des mystères sans nom et sans réponse dont les friands d'histoires insolites ou l'écrivaillonne que je suis raffolent ! Pas tous seuls sur leurs pieds, tout de même ? Ou alors, par un tour de magie, une faille de l'espace-temps ? Ces trois éléments, destinés à agrémenter une terrasse ou un balcon, probablement remisés tout l'hiver dans un garage ou un grenier, les voici tout à coup dépliés, installés, attendant d'augustes ou d'inconnus derrières ! Et en supposant qu'on ait éclairci le comment, on ne sait toujours pas le pourquoi ! Mais non, cela fait des heures que chaises et guéridon attendent, personne ne vient, rien ne se passe ! Etrange et absurde dispositif apparemment sans utilité !
Pour éviter que ce mobilier dit de plein air ne soit lentement mais sûrement envahi et grignoté par la végétation environnante, il faut que l'imagination derrière le regard s'avance et prenne le relais. Mais ... l'écrivaillonne est fatiguée, elle ne fera pas long. Il faut juste faire asseoir face à face des personnalités aux caractères, aux états d'esprit bien contrastés, faire alterner suivant les propos tenus l'ombre et la lumière (au sens propre et au sens figuré), faire converser le cynisme et la naïveté, le bon sens et le snobisme, la richesse et la pauvreté, le croyant et l'athée, le puissant et le sans grade, le vain et le divin, le génie et la cruche, la belle et la bête, un grand patron de la nébuleuse financière actuelle et un prolétaire très en colère, un dirigeant politique et un homme de la rue qui poserait à son interlocuteur des colles sur le prix des choses, Bécassine et Anna Wintour ... Oh ! L'écrivaillonne s'arrête dans son énumération car cela serait en effet le duo, ou le duel, préféré de l'écrivaillonne : la pragmatique paysanne bretonne curieuse de tout ce qui l'entoure, au-delà de sa caricature, moucherait l'icône de la mode, femme d'affaires impitoyable, en soulignant la vanité de certaines de ses valeurs ...
Il pourrait y avoir encore deux écrivains célèbres qui confronteraient leurs visions de la grande littérature, ou des peintres les leurs ! L'écrivaillonne, n'entendant pas bien les discussions animées qui se produiraient, ne pourrait retranscrire ici leurs précieux propos, mais elle rêve en revoyant des toiles et des textes qui feraient vibrer l'herbe et les buissons, qui peupleraient le ciel bleu pâlot de nuages incroyables ... Gardant encore dans le fond de son esprit les visions et les voix de Victor Hugo (ou François Villon, ou Voltaire, ou Rousseau, ou Lamartine) face à un poète, un essayiste, un philosophe du XXIème siècle, Léonard de Vinci face à un architecte et sa tablette d'ordinateur, Georges Sand face à Amélie Nothomb, l'écrivaillonne, à moins que ses yeux ne lui jouent des tours, assiste au coucher du soleil sur la scène aux chaises présentée par mère-grand ... Le rêve prend fin, les fantômes, qui à l'inverse des ... vrais, se sont montrés et fait entendre tout le jour, se sont évaporés tandis qu'entrent prendre possession de la tablée, tout plein de petits lapins et quelques grenouilles intrigués.
Lenaïg
qui remercie son ours pour avoir participé aux cogitations préalables.
Bécassine
et Anna Wintour
https://www.youtube.com/watch?v=8iaKUe8txtw