Si le chat est en dépression, pas de quoi rire, en fait, note de Lenaïg - http://www.humourr.com/divers/image-00118.html
"Qu'est-ce que j'fous là ?" est un cri d'impuissance, poussé par un humain qui, en général, ne le pousse pas tout haut, mais en ... sa ford intérieure comme écrirait Aganticus ! Un cri intérieur, donc, sauf quand il est poussé tout haut exprès lors d'un Café philo et qu'il est choisi comme thème de discussion pour la prochaine rencontre !
Un autre animal que l'homme -car n'oublions pas que l'homme est un animal, supposé "supérieur" par rapport à tous les autres pour la complexité de sa pensée-, un autre animal se la pose-t-il aussi ? Je n'en serais pas étonnée : un animal capturé dans son milieu naturel et transplanté dans un zoo se la pose sûrement au début, même s'il ne la formule pas ainsi, ensuite, la révolte passée, il s'adapte, ou pas. Un autre animal que l'homme, resté dans son milieu naturel, je l'ignore mais, au stade des connaissances actuelles, c'est loin d'être évident : les préoccupations d'ordre vitales et matérielles doivent lui occuper totalement le cerveau, sans compter qu'il est fortement guidé par ses réflexes ancestraux ; il doit se chercher sa nourriture et c'est la plupart du temps un travail harassant, il doit être attentif aux prédateurs s'il en a et quel animal n'en a pas ? Même les plus gros, comme les baleines et les éléphants !
Rappelons-nous par ailleurs que nos compagnons domestiques, chats, chiens, lapins connaissent des moments dépressifs, facilement détectables si on fait attention à eux ! Justement, c'est une des raisons de leur dépression, qu'on ne fasse pas assez attention à eux, alors leur existence doit leur paraître vide et sans objet, ce qui revient à se poser la fameuse question ! J'ai vu un reportage sur les huîtres et j'ai appris que les huîtres stressent (il y a de quoi !) et que leur état les rend perméables alors aux bactéries, virus et autres fléaux ... Sûrement que, si les autres animaux ont des souvenirs, dans certaines circonstances, ils peuvent comparer leur différentes époques de vie et souhaiter se trouver ailleurs ou "comme avant !" s'ils sont dans une mauvaise passe : "pourquoi je suis là ?"
Maintenant, si les autres animaux que nous se posent quand même cette question, de façon existentielle, autrement dit : qu'est-ce je fais sur cette terre, alors que je vais mourir au bout ? à des moments de calme et de repos, par exemple, mystère ! Ils ont leur liberté de pensée, après tout ! Ont-ils la notion de leur condition de mortels ? L'humain a toujours pensé jusqu'à présent que non, que cette question, il est le seul à se la poser et que c'est ce qui fait, entre autres, sa supériorité ! Eh ben, cela lui fait une belle jambe, à l'humain, parce qu'il n'y peut rien, à la fin de son destin ! Alors, il cherche la consolation dans la religion, ou dans la célébrité pour ne pas être oublié quand il ne sera plus. Et l'humain tourné vers les autres se dit qu'il va se rendre utile, à sa famille, à ses amis, à la société, au monde et à la planète !
Les humains bâtisseurs, soigneurs, jardiniers, artistes ont leurs réponses à cette satanée question ! Ils ont le sens de leur vie ! Les "Onc'Picsous" ont aussi le sens de leur vie : être riche, encore plus riche, écraser les autres humains, se réjouir d'être les plus malins et s'écrier : "après moi, le déluge !" Mais la fameuse question peut quand même les prendre de plein fouet, selon les obstacles et les échecs auxquels ils sont confrontés. L'homme malhonnêtement riche (et dans nos sociétés actuelles, la malhonnêteté a des frontières de plus en plus floues) se fait parfois coincer, il tombe alors de très haut, on le prive de sa liberté et dans sa cellule il a tout loisir de se poser la question et d'y répondre. Les orientations qu'il prend ne regarde que lui, je le laisse à son sort et je reviens aux autres humains, ceux qui veulent faire du bon et du beau. Ma pensée va tout droit aux écologistes qui, pour moi, sont les seuls qui réfléchissent et qui agissent à et pour l'avenir de notre planète. Devant l'autisme des grands décideurs, des dirigeants de tout poil, ils ont de quoi se poser la question, comme les humains humanitaires et bénévoles, devant l'immensité de la tâche, devant les dégâts irréparables, devant les misères qui, malgré leurs efforts, grandissent autant, ou plus, que le nombre d'humains vivants en même temps sur terre.
"Qu'est-ce que j'fous-là ?" se demande un humain pris dans des problèmes kafkaïens, accusé de crimes qu'il n'a pas commis, perdant ses repères, ou, pire, balloté dans la tourmente d'une guerre, emprisonné sans savoir pourquoi ou pour des idées qu'il pense justes et qui ne sont pas dans la norme ! La question se double quand on est emprisonné : qu'est-ce que je fais sur cette terre et qu'est-ce que je fais en prison ?
Après s'être posé la question, deux solutions : soit on baisse les bras, soit on rassemble tout son courage pour continuer à exister et agir, comme le mythique Sysiphe cher à Albert Camus continuait à pousser son rocher en haut de la montagne pour le voir dégringoler et tout recommencer. Et si l'essentiel et les réponses se rencontraient lors de l'ascension ? Et si on lâchait ce rocher inutile et absurde pour s'intéresser aux chamois, aux aigles, aux colonnes de fourmis, au vent caressant le visage, au panorama en bas, pour se sentir faire partie d'un tout ? On se laisserait aller au plaisir d'exister, de lutter pour que sa vie soit belle et celles des autres aussi, on ne s'inquiéterait plus de l'épée de Damoclès au-dessus de sa tête ! Certes, elle serait toujours là, tandis que l'écho continuerait à répéter : "qu'est-ce que je fous là ?"
Lenaïg
Elucubrations d'avant Café philo, à Ivry, jeudi soir !
Oh, j'y pense : il y en a un qui a su répondre à la question, quand il était en prison (il y est même resté longtemps, et par choix, pour ses idées) c'est Nelson Mandela !